25
et 26 décembre 2003
Pearl Harbor II - Comme une boule au coconut
25
décembre 2003
Pearl Harbor II
Nous quittons
Daly sous la pluie. Ensuite, nous traversons les villes qui entourent
San Francisco et nous arrivons dans le soleil sur le bord de la côte.
La journée est magnifique. On s’arrête pour regarder
les vagues et marcher sur le bord de la mer. J’ai téléphoné
à mon petit papa qui s’est cassé la cheville et
le pauvre ne peut plus marcher du tout. Par chance, ma tante Marie-Paule
s’occupe de lui et plusieurs personnes lui rendent visite. Nous
passons Pacifica et nous roulons sous la chaleur du soleil entre ces
montagnes de grains de sable agglomérés recouvert de ces
petits arbustes épicés. Nous voulons passer Noël
dans cette nature merveilleuse qui se présente à nous.
Nous voulons vivre ce décor de film et vers la fin d’après-midi,
nous voyons une pointe escarpée qui monte et tombe en falaise
dans la mer. La carcasse de béton d’un édifice défiguré
par la tempête surplombe un monticule de rock sablonneux tout
au sommet de cette pointe.. Aucun signe de propriété privé
nous donne confiance d’avoir la paix et nous escaladons la colline
en poussant nos vélos jusqu’en haut. Nous montons la tente
et nous profitons de la vue superbe qui donne sur l’océan
qui avale lentement le soleil orangé et rose. On respire profondément
et avec calme en regardant les oiseaux marins les ailes largement déployées
dansant au gré des poussées du vent. Puis, la pénombre
nous envahie et nous nous retirons dans la tente pour préparer
à manger, l’estomac creux.
Tout à coup, le vent se met à souffler. Il souffle si
fort qu’il me rappelle les nuits arctiques où je me réveillais
en sursaut, croyant que le moment était enfin arriver pour que
ma tente s’envole. Les tendeurs s’arrachent et le vent écrase
la tente sur nous. Bien sûre nous ne pouvons pas cuisiner, mais
nous devons plutôt réagir avant que la tente déchire.
Nous crions pour s’entendre avec les rafales qui frappent comme
des tambours. « Bon, qu’est-ce qu’on fait?! »
. « On a besoin d’énergie. On mange des bonbons!
» Donc, on mange des toffees miam, miam. « On peut attacher
les tendeurs après les vélos. » « O.K. »
On sort tous les deux bourrés d’adrénaline et l’on
tente de retenir la tente en plaçant les sacs les plus pesants
sur les points de fixation et en attachant les cordes après Bertrand.
Rien ne fonctionne. Le vent est de plus en plus fort et atteint des
vitesses effrayantes. Francis et moi retenons avec toute notre force
et notre poids les tendeurs de la tente qui est maintenant écrasée
sur le sol sous la force de ce monstre. Nous devons absolument la démonter
avant qu’elle se brise. On ne peut pas prendre la route dans la
nuit avec le trafic des vacances sur ce chemin sinueux longeant la falaise.
L’unique option est la tour de garde qui s’élève
dans la nuit, chargée d’histoires dont on ne connaît
pas le dénouement. Entre deux bourrasques de vents, je rentre
dans notre casita pour ranger le matériel pendant que Francis
retient les tendeurs. On sert le tout dans un temps record et l’on
commence l’escalade de la tour avec quelques sacs.
Pour entrer, nous devons marcher en équilibre sur une bordure
et se glisser dans une fente horizontale dans le mur. En éclairant
avec la petite lampe, nous pouvons voir les murs couverts de graffitis.
Je rentre en premier et Francis me passe les sacs. L’endroit est
pour ainsi dire des plus sinistres. Le plancher est couvert de bouteilles
de bières cassées et l’on voit que l’endroit
a un long passé dans le vice. Un vrai bunker où je ne
tripperais pas bien à faire de l’acide. On tente de ne
pas s’arrêter à penser à qui sont les gens
qui fréquentent cet endroit dans leur nuit de débauche.
Nous balayons les morceaux pour étendre les matelas. Nous mangeons
l’estomac serré et pas très rassuré par notre
situation. L’édifice vibre sous les rafales de vent. Nous
dormons bien collés, avec des tueurs fous qui hantent nos rêves.
26
décembre 2003
Comme une boule au coconut
On se réveille
dans notre merveilleux bunker style bière avec arrière-goût.
L’aventure de la veille était trop trillante. C’est
fou comment je me sens vivante. C’est fou comment nous formons
une bonne équipe ensemble Francis et moi. On s’arrête
prendre un café dans la prochaine ville et nous demandons à
la serveuse d’où vient cette tour. La tour de garde aurait
en fait été construit par l’armée américaine
pour surveiller dans le cas d’une attaque japonaise durant la
deuxième guerre mondiale.
Nous roulons assez poqués, mais contents. Dans une pause du dîner
à un phare historique, une famille en vacances vient nous parler
et nous inviter chez eux où nous passerons dans quelques jours.
Nous terminerons cette journée couchés à côté
d’un champ de chou-fleur à tenter d’en finir avec
les 12 kilo de polenta que j’avais eu la bonne (?!) idée
de cuisiner pour épargner des sous. On en a mangé de la
polenta sous toutes ses formes, même fermentée.