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1er au 4 janvier 2004

1er janvier 2004
Nouvel an chez les Morey

On se lève pas très motivé par le bike. Le ciel est gris et le vent souffle comme un fou. Sur l’autoroute, nous sauvons de la mort un petit rongeur hystérique qui allait gambadé sur la ligne jaune. Nous roulons lentement et croisons pleins de cyclistes qui profitent de leur journée de vacances. Nous arrivons à Cayucos où les centaines de gens venaient d’assister à la baignade de l’ourse polaire, une activité annuelle où des gens en costume de bain sautent dans l’eau glacée pou le fun! On rencontre Jeremy, un gars de CAGJ un groupe interviewé à Seattle qui nous souhaite encore bon voyage. Nous allons nous chercher un café pour se réchauffer du temps froid et de la pluie. Nous téléphonons à la famille Morey qui nous propose de venir nous chercher en camion pour nous amener chez eux à Atascadero, à une vingtaine de kilomètres dans les montagnes. Nous les attendons avec la hâte de les rencontrer. Pendant ce temps, nous écoutons des cyclistes se plaindre de cette terrible randonnée sous la pluie. Man, ça fait plus de deux mois que l’on patauge dans cette pluie et un froid beaucoup plus mordant. Nous sommes bien amusés par leurs commentaires.

Rich et David arrive avec la camionnette et nous amène jusqu’à leur maison. En arrivant, nous sommes accueillis par Denise et toute la famille. Près du feu de foyer, nous racontons un peu notre voyage à David, Andrew et Benjamin. Un couple d’invités arrivent. Nous passons un merveilleux jour de l’an avec cette famille joyeuse et unie. L’on discute de pleins de choses en mangeant de la lasagne et de la salade, et pour dessert d’excellents biscuits. Erin, la petite fille de sept ans et bébé de la famille, pose des questions très pertinentes sur ce que l’on fait. Benjamin marche en se faisant des pattes de canard avec les mitaines du four. Erin raconte pleins d’histoire et l’on joue à des jeux ensemble. On passe du bon temps chaleureux et l’on partage de très bons moments avec cette famille. Nous dormons en paix et heureux. Nous nous levons le lendemain matin et nous déjeunons avec les enfants. Denise et Andrew viennent nous rapporter sur notre route et nous leur disons nos adieux. Nous découvrirons un super sac à surprise que la famille avait discrètement glissé dans nos sacs.


2 janvier 2004
Latino-américain, citoyen de seconde classe

Nous quittons donc la famille Morey et nous roulons vers San Luis de Obispo. Nous passons dans un joli parc bordé d’une montagne et d’un marais sur l’autre côté. Nous traversons la ville et cherchons notre chemin pour se rendre à Santa Barbara. Avant le couché du soleil, nous traversons la ville composée presque uniquement de latino-américain, surtout d’origine mexicaine. Pendant que Francis est aux toilettes, je jase avec un vieux mexicain qui est aux États-Unis depuis une vingtaine d’années. Comme nous en avons croisé plusieurs, certaines villes américaines sont peuplées d’immigrants mexicains qui sont venu aux États-Unis pour fuir le chômage dans leur pays et gagner des sous. Comparativement aux revenus qu’ils peuvent gagner au Mexique, la vie est plus facile aux Etats-Unis, malgré les conditions plutôt indignes dans lesquelles ces travailleurs doivent vivre selon les standards américains. Un immigrant mexicain se voit plutôt limité dans sa perspective d’emploi lorsqu’il arrive aux Etats-Unis. Les jobs qui recrutent des mexicains sont celles qui embauchent une main-d’œuvre bon marché principalement dans l’agriculture ou dans les fast-food. Les salaires sont si bas qu’aucun américain blanc ne voudrait s'y soumettre. Cloîtrés dans leur ghetto tiers-mondiste, les mexicains se forment des villages de solidarité afin de se remettre des blues de leur pays natal et de leur famille qui est resté là-bas.

En effet, une quantité incroyable d’argent est renvoyée au Mexique et participe beaucoup à l’économie du pays. Avec un racisme omniprésent et hostile face à l’immigration mexicaine, les immigrants forment une sous-classe pauvre qui s’intègre difficilement à la population américaine. Même si l’exclusion peut sembler moins accablante que celle de la population noire qui ont un passé d’esclavage et d’aliénation troublant, en définitive les États frontaliers du Mexique ne sont pas une terre d’accueil pour les immigrants mexicains. Bien au contraire, quoique les industries américaines profitent de cette main-d’œuvre dans le besoin, il n’y a pas de reconnaissance du travail acharné que fournissent ces immigrants. Le nombre d’illégaux vivant dans des conditions précaires font le jeu des employeurs américains. Avoir la citoyenneté est le rêve inatteignable pour la majorité d’entre eux, condamné à vivre sans protection face à l’expulsion des États-Unis. Le vieil homme que j’ai rencontré était malade, vivant avec sa vieille mère. Ces enfants sont toujours au Mexique et il envoie de l’argent pour leur assurer de meilleures conditions, une chose qu’il ne pouvait pas accomplir de son propre pays.

Nous avons terminé cette journée près de Orcutt, pour dormir dans un champ caché par un viaduc à la croisée du chemin de fer. La lune était pleine et les renards aboyaient dans les montagnes.


3-4 janvier 2004
Santa Barbara, tu me diras pour-quoi j’ai le mal de vi-vre

Nous roulons bien tranquille dans les derniers pans de nature avant Los Angeles. Il y a des falaises, des rapaces et des vaches qui broutent doucement. Des beaux champs sauvages et blonds s’étendent entre des blocs rocheux. Nous dormons sans payer dans un parc fédéral.

Le lendemain, pour éviter d’affronter une grosse côte, nous faisons les ingénieux non-sportifs et démontons la clôture pour atteindre la route. Héhéhé! Nous la remontons ensuite ni vu, ni connu. Puis nous continuons notre chemin vers Santa Barbara. Arrivés dans la ville, un cycliste nous indique un bon chemin vers un camping. Nous traversons le centre-ville qui est bourré de boutiques chics et de restaurants high-class. Nous roulons près de la plage en croisant des artistes peintres, des patineurs et des marcheurs en promenade. Suivant les instructions du cycliste, nous passons dans un quartier de riches avec des maisons énormes, des garages à quatre portes, des chars mercedes de l’an prochaine et un terrassement de plusieurs milliers de dollars. En pissant sur un arbre, Francis cause un émoi dans le quartier. L’on tente de retrouver notre chemin égaré lorsqu’un gars ultra-efficace nous offre de nouvelles directions. On roule comme des fous pour arriver afin au camping de Carpinteria, 2 piastres chaque pour dormir à côté d’un chemin de fer, quel bon deal!?!