20
au 30 septembre 2004
Perla del Pacifico
20 au 22 septembre 2004
Nous
arrivons à San Miguel et nous trouvons un charmant hôtel
qui est tenu par une salvadorienne qui s’est refugiée à
Vancouver durant la guerre civile au début des années
80, après la mort de son mari. Elle a passé 20 ans au
Canada et elle a finalement décidé d’essayer de
refaire sa vie au Salvador. Son frère est médecin et l’a
aidé à partir un hôtel ici.
Les
gars de la télé viennent enfin nous filmer pour vrai.
L’expérience est vraiment intéressante. Ils nous
posent pleins de questions et on torche en espagnol. Ils nous font faire
mille tours en vélo sous le gros soleil. Je ne croyais pas que
c’était si dure être une star! J’aime mon public
et mon public m’aime.
Autre
sujet : la chronique touristique!
San
Miguel a beaucoup à offrir au touriste de passage comme de merveilleux
centres d’achat où l’on peut retrouver des produits
américains, à des prix américains. Aussi, le pays
se transforme peu à peu. Nous l’avons constaté en
traversant plusieurs villes, on a l’impression que le pays se
construit pour une minorité riche qui a les moyens de se payer
les produits américains. Nous avons marché dans quelques
centres commerciaux typiquement américain, avec des produits
surpassant les prix du Canada. Si le ¨développement¨se
poursuit, les ciudades salvadoriennes paraîtront comme des villes
américains avec les pauvres (la majorité) qui sont repoussés
en périphérie ou forcés à l’exil.
Il est difficile de savoir combien de Salvadoriens ont fui vers les
Etats-Unis, mais ce mouvement migratoire est loin d’être
terminé malgré la fermeture des frontières américaines
et tous les risques à courir pour ces gens dont le seul espoir
d’améliorer leur condition de vie se loge dans le rêve
américain. Les Etats-Unis, terre de richesse et d’opportunité!
La fièvre du billet vert en mènera plus d’un vers
le désenchantement car le paradis recherché n’existe
pas. Qui veut aller vivre aux Etats-Unis? Pas moi entout cas!
Un éveil mental
Je crois qu’avant ce voyage, si quelqu’un m’avait
demandé si j’étais féministe, j’aurais
dis « je ne crois pas ». Ceci est dû à deux
choses :
1
- le terme féministe est malheureusement chargé d’une
vision préconçue qui serait fortement associée
à celle d’une femme qui préconise un monde excluant
les hommes. Comme je crois que tout le monde mérite de vivre
avec la plus grande liberté possible pour développer et
exercer son potentiel de manière à s’accomplir comme
personne jouant une place contributive dans la société,
et que cette personne en question n’est pas plus homme que femme
que noir que blanc.
2
- Dans cette perspective, la pauvreté, la marginalisation et
l’exclusion sont des réalités qui m’ont touché
davantage et qui sont des pierres trop lourdes que pèsent sur
le dos de milliards d’individus sur cette planète qui de
ce fait, ne peuvent pas jouir de cette liberté.
En
tout cas, tout ça pour dire que je crois que je n’avais
pas réalisé à quel point le sexisme est un frein
à l’émancipation de tant de femmes dans le monde.
Il a fallu que j’en vive les conséquences pour m’ouvrir
les yeux. Par chance, ma route à croiser celle de deux femmes
merveilleuses : Élisabeth (55 ans et plus) et sa fille Antonia.
Enfin, j’ai pu discuté avec des femmes sur la situation
au Salvador. Elles m’ont expliqué que la société
salvadorienne est très machiste (j’aurais deviné!!).
Qu’ici l’homme est roi et que la femme n’est rien
ou pas grand chose. La femme doit être au service de son mari.
Antonia qui est étudiante en psychologie à l’université
me confiait qu’elle est une personne sociable et qu’au Canada
il n’y avait pas de problèmes. Cependant à son arriver
au Salvador, son comportement de sourire et de saluer les gens, femmes
et hommes, lui ont valu une réputation de « slot »
pour utiliser son expression. Une femme mariée au Salvador ne
doit pas parler à un autre homme et lorsqu’un homme respecte
un autre homme, il n’adresse pas la parole à sa femme pour
ne pas attiser sa jalousie.
Le mari d’Antonia est un salvadorien plutôt unique, venant
d’une famille dont la mère est professeur d’université.
Son comportement est donc différent des hommes de son pays et
il aime parler aux gens qu’ils soient homme ou femme. Antonia
racontait que plusieurs femmes lui avait demandé si elle n’était
pas jalouse de voir que son mari « couraillait », c’est-à-dire
parlait à d’autres femmes. Élisabeth, qui a un compagnon
de vie salvadorien qu’elle a connu à son retour, raconte
qu’elle doit tout faire pour lui et qu’il est impossible
pour l’orgueil de son compagnon de penser faire la lessive, par
exemple. Lorsqu’il s’assoit à table, elle doit prévoir
s’il aura besoin de sel pour la soupe ou de café, de peine
qu’il aille à se lever de table pour chercher ce dont il
a besoin.
Cette
conversation m’a montré à qu’elle point cette
attitude, ce code de conduite, est généralisée,
suite à ce que j’ai vécu et aux dires de mes deux
amies. Je me suis sentie vraiment exclue durant notre passage dans ce
pays car je n’ai pas joui de beaucoup de rencontres que nous avons
eues. Je suis vraiment heureuse de pas être née ici, d’avoir
un avenir beaucoup plus brillant que celui de servir mon mari et de
rester à la maison. Je me rends aussi compte que la solidarité
masculine est plus instantanée et automatique que peut l’être
la solidarité féminine. Ce qui selon moi nuit beaucoup
aux femmes c’est de ne pas trouver assez de soutien chez leur
paire.
Un
autre événement rigolo s’est produit lorsque l’ami
de Victor et Lilian nous a amené manger des spécialités
salvadoriennes, sur le bras de nos amis. Le type nous parlait à
tous les deux et même jasait davantage avec moi. Puis, il nous
demande si nous étions frère et sœur. Lorsque nous
avons dit que nous étions marié (chose que l’on
dit pour éviter d’expliquer notre situation conjugale incongrue
dans ces pays), l’attitude de l’homme a complètement
changé. Il a paru mal à l’aise et a commencé
à ne s’adresser qu’exclusivement à Francis.
La
cerise sur le Sundae!
Alors que le journaliste de 4 vision (la principale station de télé
du Salvador) nous disait qu’il passerait notre reportage le jour
même, il n’a pas passé. Il a téléphoné
le lendemain pour dire qu’il passerait ce soir-là assurément,
que le montage avait été fait et que les images étaient
très belles, qu’ils y avaient de la petite musique et blablabla…
Le soir venu, nous attendons le reportage et nous nous sommes fait doubler
par l’entrevue avec les participantes du concours de Miss Salvador!
L’entrevue avec cette élite féminine (hahaha!) du
Salvador a duré plus de quinze minutes sur une émission
d’une heure. L’événement s’est reproduit
le lendemain aussi alors que nous attendions toujours pour notre reportage
qui n’est jamais venu…
Pourquoi
ce journaliste qui a couru après nous pour l’entrevue nous
aurait-il menti? Avons-nous parlé de quelques choses qui aurait
déplu à la station de télévision? Est-ce
à cause de notre position contre la Zone de Libre-Échange
des Amériques? Ce sont des questions auxquelles nous n’aurons
pas de réponses.
On crisse notre camp! Youppi!
23 septembre 2004
Notre épisode salvadorienne se termine et je dois avouer être
bien contente. J’espère trouver des gens plus sympathiques
(ou moins machistes) sous le ciel du Honduras.
On
manque de se perdre à la sortie de San Miguel car les gens nous
indiquent des directions erronées. On passe le dîner à
Santa Rosa où l’on se bourre la face de nos dernières
pupusas, enfin j’espère. En attendant que le soleil brûlant
refroidissent un peu, nous relaxons dans le parc de la ville. Ici on
joue avec des petits garçons gentils qui s’amusent fort
avec ma coquerelle en caoutchouc. On reprend la route vers la frontière.
Je m’arrête pour prendre une photo de la magnifique rivière
et du pont qui se voit au loin. En m’approchant près de
l’escarpement qui se poursuit dans la rivière, je découvre
un bucolique dépotoir municipal dont les jus se plongent vers
le cours d’eau. Quelle vue enchanteresse!
Nous
arrivons pour traverser la douane mais nous sommes à sec d’argent.
Il nous reste moins de 2 $US et le gars de la douane nous demande de
payer les frais d’entrée au pays. Avec nos faces d’innocents
nous avons encore reçu à esquiver ce paiement… Et
ce douanier, nous l’avons bien eu!
Nous
restons quand même de beaux stupides paumés car nous n’avons
pas d’argent pour manger. Nous demandons l’hospitalité
à une bonne dame qui accepte de nous préparer à
manger pour les quelques sous que nous avons. Elle nous raconte que
nous ne sommes pas les premiers cyclistes à dormir sur son terrain.
La maison semble avoir un espèce de magnétisme pour les
cyclistes voyageurs. La dame nous cuisine un bon souper et elle nous
présente ses petites-filles Darling et Honey. Pour accompagner
le repas, elle nous sert un verre d’eau qui n’est pas transparente.
Cette eau est chargée de calcium ou de calcaire… Après
de longues discussions, la femme nous raconte son opération où
elle s’est fait enlevée ses pierres aux reins. Elle nous
les a montré et ils étaient gros comme des balles de billards.
Vu qu’il n’y a rien dans la région, elle a dû
se rendre au Nicaragua pour se faire enlever son rein. J’ai été
très surprise parce que le Nicaragua est un pays plus pauvre
que le Honduras. La dame nous a aussi parlé de la tentative de
privatisation des services de bases que le pays a vécue. Heureusement,
la population a su réagir à temps, mais l’électricité
a été privatisée et les coûts ont augmenté
disait-elle.
Célébrer notre année de voyage aux Caraïbes!
24 septembre 2004
Nous partons assez tôt et la dame nous laisse notre argent à
condition de repasser la voir si nous revenons au Honduras. Sur la route
les gens sont très souriants et ils nous saluent chaleureusement.
Nous sommes encore une fois sidérés de constater les différences
qui existent d’un pays à l’autre, alors que ces pays
sont si petits et que les gens y parlent la même langue. Nous
faisons 35 km avec seulement un café et un petit pain dans le
ventre.
Nous allons d’urgence à la banque de la ville de Nacaome
en espèrant y trouver un guichet automatique. Comme c’est
beau la technologie! Je dois avouer que la présence des guichets
automatiques me font remarquer chaque fois à quel point notre
aventure est banale comparativement à celle des grands explorateurs
qui arrivaient dans des contrées complètement inconnues.
Maintenant,
le voyage est vraiment à porter de tous (ceux qui ont de l’argent!?),
même les plus froussards, car les dangers et insécurités
y sont quand même très réduits. Après avoir
mangé, nous pensons à faire quelques choses de spécial
pour célébrer notre an de voyage. Nous rencontrons un
hondurien hippie fan des Etats-Unis qui nous chante sa toune d’appui
aux victimes du World Trade Centre et nous parle de Omoa. Nous nous
retrouvons dans un bus en direction des caraïbes, alors que les
bikes reposent dans la station de police jusqu’à lundi.
Nous sommes partis à 14hrs et nous faisons le trajet suivant
: Jicaro Galan- Tegucigalpa; Tegucigalpa- San Pedro. Je me rend compte
que faire du bus c’est ennuyant et très facile. Nous arrivons
de nuit à San Pedro et nous prenons le taxi qui nous charge trop
cher, pour prendre le dernier bus qui partait vers Puerto Cortes. Le
bus est bondé et pendant que nous sommes debout, un type engage
la conversation avec moi. Il s’appelle Ivan et est étudiant
en Droit. Il est très efféminé et s’adresse
principalement à moi. J’en conclue qu’il doit être
gay. Il nous invite dans sa maison pour y passer la nuit. Rendu à
Puerto Cortes, nous constatons vraiment une influence différente
que sur la côte pacifique. Les gens sont métissés,
les maisons sont construites davantage en bois et les gens écoutent
du rap ou du reggae. Ivan est super gentil. Il nous amène dans
les rues poussiéreuses où il salue plusieurs amis en passant.
L’ambiance est relaxe nous jasons dans sa cabane en bois.
The Roly’s place
25-26 septembre 2004
Même si notre ami nous invite à dormir chez lui, nous préférons
aller dormir à Omoa enfin de profiter de notre intimité…
Ivan nous accompagne jusqu’à l’autobus et il attend
avec nous pour une couple heure. Dans le bus, nous avons le plaisir
de regarder les différentes physionomies et couleurs de peau
des mulâtres, métisses… Les populations noirs du
Honduras viennent de la traite des esclaves qui ont été
amené par les anglais lorsqu’ils avaient le contrôle
de ce territoire comme celui de la côte atlantique nicaraguayenne.
Arrivés à Omoa, on se retrouve dans une place très
cool et cheap. C’est the Roly’s place avec le jardin et
une chambre superbe. On passe les jours qui viennent à se baigner
dans la mer, à se faire de la bouffe et à terminer Mama
Maquin. On se baigne sous les étoiles dans les eaux calmes. On
va acheter des poissons chez les pêcheurs et on le cuit au BBQ
dans notre hôtel. Le résultat est excellent et nous accompagnons
le tout avec un rhum jus d’orange. Je dois quand même avouer
que je ressens un petit stress depuis que nous avons fait un itinéraire
avec des dates. J’ai l’impression que je n’ai pas
le loisir d’écouter mon corps qui se sent épuisé
par les journées de gros soleil.
Le
26 vers 16hrs nous revenons chez Ivan pour fêter le 1 an de voyage
avec lui. Il semble un peu contrarier que nous ne soyons pas revenu
avant pour le voir. Nous passons quand même une super soirée.
Il nous amène au centre-ville et nous allons savourer les flautas
honduriennes alors qu’il nous parle de sa famille. Je me sens
comme avec une amie qui placote sans arrêt sur les potins des
environs. Pour payer ses études, Ivan travaille à la maquila.
Il dit que les conditions sont assez mauvaises, mais que son travail
de nuit lui permet de continuer ses cours à l’université.
On passe devant la zone franche en retournant chez lui.
Retour aux vélos, vol et grippe.
27 septembre 2004
Ivan
nous réveille à 4h30 pour que nous puissions prendre le
bus de 5h. Je suis vraiment zombie. Ivan nous accompagne jusqu’à
l’arrêt pour nous dire au revoir. Les bus s’enchaînent,
les paysages passent vite sous nos yeux. Un peu innocemment, nous laissons
nos sacs dans l’autobus quelques minutes pour aller chercher un
café. Ce serait à ce moment que quelqu’un aurait
volé mes lunettes, mes lettres et cartes postales pour les amis
et le cadeau pour ma nièce. C’est assez frustrant puisqu’en
plus cette personne ne pourra pas s’en servir. On arrive à
la station de police vers 14hrs. Les bikes sont toujours là.
On reprend la route sous le gros soleil pour se rendre à San
Lorenzo où nous pensons que Francis pourra traduire Mama Maquin.
On demande à un homme pour un hôtel très économique.
Il voit notre face blanche et nous envoie au bout du monde par une route
de terre vers un endroit de retraite nature par 25 US. la nuit. On revient
assez abattu par les 10 tours de la ville, on trouve la perle du Pacifique.
Je suis morte. Je fais de la fièvre et je suis atteinte de la
pire grippe en carrière. Mon corps me fait mal et je vaque sans
trop de conscience sous le fan, couché en étoile sur le
lit. Je passerai ainsi les jours suivants.
Crevettes sur le grille
29 septembre 2004
Je me force assez fort pour sortir de cette maudite chambre. Je veux
et je dois aller visiter Coddeffagolf, une organisation qui s’oppose
à l’aquaculture de crevettes (j’avais fait une grosse
recherche sur ces organisations durant mes études). Le président
nous reçoit avec gentillesse, il nous placote pendant des heures
et nous terminons l’entretien satisfait de connaître les
histoires de l’organisation. Après le couché du
soleil, nous allons marcher au port. Des éclairs brisent la noirceur
dans le Golf de Fonseca et nous écoutons sauter les poissons
et crustacées qui habitent cet endroit.
De la mangrove jusqu’à Copa Cabana
30 septembre 2004
On
se lève tôt et l’on part malgré ma grippe
car je ne pourrai quitter cet endroit sans avoir visité la mangrove.
Nous arrivons en bus à El llano et nous avons l’eau et
la forêt de chaque côté de la route. Nous trouvons
des pêcheurs qui après un long moment d’attente et
de placotage sur Jesus, acceptent de nous amener en bâteau faire
un tour. Je suis éblouie. Les oiseaux, les palétuviers,
les poissons et les mud skipper sont trop fantastiques. Les pêcheurs
nous amènent sur la terre ferme pour voir les arbres de plus
près, mais après cinq minutes ils sont déjà
pu capable de supporter les piqûres de moustiques. Le jeune garçon
qui rame en avant va à toute bolo-cidad, dit-il.
On
revient ensuite à San Lorenzo pour partir en vélo et se
rendre à Choluteca. Les nuages sont magnifiques et nous passons
le temps du couché de soleil pour finalement arriver à
Choluteca dans la noirceur et la pluie torrentielle. Nous n’avons
pas un rond puisque nous avons passé plus de temps que prévu
à San Lorenzo. On traverse la ville à la recherche de
guichet qui fonctionne mais ils semblent tous hors d’usage. Comme
deux chats mouillés et le ventre qui gargouille, nous nous demandons
ce qui se passera sans un rond. Nous trouvons la lumière au bout
du tunnel et nous nous relâchons avec des billets en main. Selon
les conseils d’un gardien de banque, nous allons dans les chemins
boueux vers l’hôtel Copa Cabana. La chambre dont les draps
sont défaits, la poubelle pleine de papiers de marde et la serviette
sale pend devant les mûrs couvert de rouge à lèvre
et autres traces. Je demande avec timidité à la fille
de l’hôtel qui a environ mon âge si elle peut au moins
vider la poubelle et laver la toilette. Elle me regarde en riant et
ne semble pas comprendre ce que je veux dire. Puis, elle me donne une
claque sur la bédaine en rigolant et « lave » en
mettant de l’eau dans l’évier et la toilette. Le
savon est donc une notion qui n’existe pas à Copa Cabana…