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au 16 novembre 2004
Un
blitz commission
9-11 novembre 2004
San
José. Ville assez sympathique. J’ai surtout apprécié
le loisir de respirer au centre-ville, ce qui n’est pas assurée
dans toutes les villes latino-américaines. En effet, la rue principale
est interdite aux autos et ça fait une différence dans
la qualité de l’air. Nous avons commencé notre rush
commission en allant acheter des souliers à Francis puisque les
siens mangeaient des camions. Nous cherchons aussi de la gazoline blanche
pour le réchaud et une casserole pour remplacer celle que j’ai
perdue. Puis, nous devons faire réparer notre bouteille de gaz
pour le réchaud car depuis le Nicaragua nos brosses à
dent sont aromatisées à l’essence. Nous avons fait
toute la quincaillerie et nous savons que MRS ne distribue pas en Amérique
centrale donc, soit on la fait réparer ou on s’en fait
envoyer une. Francis téléphone à un soudeur d’aluminium
qui nous envoie chez son cousin dans un garage du nord de San José.
Nous partons en autobus et cherchons le garage. Le type ne peut pas
nous aider mais il nous envoie une rue plus bas, chez un autre soudeur.
Là-bas, ils ne peuvent pas faire la réparation mais après
avoir expliquer notre situation, la patronne se donne pour nous trouver
de l’aide. Elle fait un téléphone chez Aire Acondicionado
kêquéchose qui pourrait probablement nous arranger ça.
Elle prend quelques directions et nous partons en taxi avec leur carte
d’affaire. Le taxi nous descend près de l’église
selon les indications de la carte d’affaire. Nous marchons vers
l’Est mais il n’y a rien. Les gens ne savent pas c’est
où, ou nous disent des informations contraires. Nous allons vers
l’Ouest et encore vers l’Est et le Sud et probablement le
Nord aussi.
Arrêtés sur un coin de rue, nous sommes au petit désespoir
de faire réparer notre bouteille, imaginant le futur avec des
nuages noirs. Puis, un gars de notre âge, avec des percing et
tatoos nous demande s’il peut nous aider. Il appelle le Aire acondicionado
qui leur donne leur nouvelle adresse, il aurait déménager
depuis 5 ans. Il offre de nous faire un lift. La musique dans le tapis,
le gars est vraiment drôle. Il arrête des gens pour leur
demander des indications en disant « hé cousin ou aye papi!
». Il nous amène à bon port. Nous parlons au patron
de Aire A. et nous dit d’aller derrière le bâtiment
pour parler au Chino. En arrière, un chinois nous répare
notre bouteille en deux secondes gratis. Cette journée d’aventure
nous montre que les gens sont vraiment gentils avec nous… On finit
la journée en mangeant du bon gâteau.
Communication avec les chevaux
12 novembre 2004
Durant les nuits passées à l’hospedaje, j’ai
très peu dormi à cause des rats qui grattaient pour entrer
dans notre chambre et pour mes attaques d’allergies respiratoires.
Même bourrées de pillules, je devais me moucher à
chaque 5 minutes avant de me noyer. Mes allergies me donnent le teint
d’une fille ayant reçu environ 10 coups de pelle sur la
tête. Heureusement, l’amour est aveugle!?
Tout
ça pour dire que je ne pète pas le feu lors de notre départ
de San José. Alors que nous arrêtions prendre un jus, nous
assistons à un accident traumatisant d’une voiture frappant
un jeune garçon en vélo qui est tombé sur la tête.
Finalement, selon ce que nous avons compris, il s’en serait sorti.
Nous sortons de la ville avec une montée extravagante. La vue
sur San José est superbe. On fait des pauses très souvent
et arrivés presque au sommet de la montagne, nous demandons à
l’employer d’une serre s’il ne connaît pas un
endroit où nous pouvons camper. Nous avons fait à peine
14 km mais je suis morte, en partie à cause de la montée.
Derrière la serre, il y a un terrain avec trois chevaux où
nous pourrions camper. Nous allons sur le terrain et plantons notre
tente. L’endroit est un champ d’où nous voyons des
grands pins et d’autres arbres portant des broméliacées.
Après souper, je vais m’asseoir seule dans le champ pour
réfléchir et regarder le paysage. Puis, un cheval s’approche.
Lorsque je bouge, il s’éloigne en courant, puis revient
m’observer. Assise, toute petite, je reste immobile. Le grand
cheval gris et à la crinière blanche me regarde avec ses
yeux noirs et curieux. Il s’approche tout doucement et vient coller
son museau sur mon nez. J’ai tout mon corps qui chatouille à
sentir la respiration de ce grand être sensible et intelligent.
Nous restons comme ça à respirer et je bouge mon nez comme
lui. Puis, il s’effraye et courre au loin. Il revient ensuite
lentement vers moi pour venir coller son museau à nouveau. Nous
resterons comme ça un moment à se regarder les yeux dans
les yeux et à se sentir.
Mauvaise route mène à une mort prématurée
13-14 novembre 2004
J’ai encore eu des allergies durant la nuit. Je suis encore très
épuisée et j’ai même de la difficulté
à supporter le poids de mon vélo. Lorsque nous avons quitté
San José, nous avions le choix de prendre encore l’autoroute
ou de prendre une route secondaire. Nous avons choisi l’option
2 pour fuir le trafic sans nous imaginer les impacts de notre décision.
Nous sommes bien sûr arrivés à des côtes dont
l’inclinaison nous fait réellement envisager la retraite
ou l’adoption de petites vitesses plus petites. En arrivant à
une intersection, nous sommes sur l’élan de descente et
passons une pancarte à toute vitesse. Je ne prends pas bien le
temps de vérifier sur la carte et nous entamons la descente d’enfer.
Les courbes sont si étroites et l’angle si fort que l’on
sent le caoutchouc brûlé de nos freins. Je vais devant
et je saute une faille qui arrivait trop vite dans la courbe. Ça
ne m’amuse pas tant que ça! Je suis assez chicken pour
la trop haute vitesse ou autre truc casse-cou. Dans ces occasions, mon
cerveau ne veut pas arrêter de me montrer des images de moi en
mille miettes et ça me coupe l’envie. De toute façon,
nous avons dû descendre plus de 15 km de côtes infernales
avant de nous rendre compte que nous étions dans la mauvaise
direction. Hum! C’est la première fois que je me trompe
de tout le voyage mais je voudrais bien mourir plutôt que remonter
cette côte. On s’installe sur la route pour faire du pouce.
C’est notre jour de chance et nous trouvons un lift. Les hommes
de la voiture me disent de m’asseoir devant et que Francis restera
derrière avec les vélos. Je parle avec les messieurs qui
sont gentils et j’ai été contente que le machisme
ait été à mon avantage pour une fois.
Quand
Francis est descendu du camion, il n’était pas très
content. « J’ai passé le voyage écrasé
par les vélos, assis dans la pisse des trois chiens du conducteur
» a-t-il dit. Puis, nous commençons une autre descente,
à peine plus facile que la précédente. Il fait
très chaud et nous devons recommencer la montée terrible.
Nous arrêtons dans un village pour se rafraîchir et moi
je suis claquée. Le manque de sommeil rend tout insupportable.
Nous demandons à la jeune serveuse si la route continue à
monter. Elle manque s’étouffer en entendant notre question
et n’hésite pas à dire oui avec les yeux exorbités.
Nous demandons donc s’il y a un endroit où nous pourrions
camper. Son père est propriétaire d’un centre balnéaire
qui est fermé pour la saison et nous pouvons y aller pour camper.
Nous nous y rendons et le site est parfait avec un toit, une table et
des bancs. Je reste coucher dehors à lire.
Je
ferai la même chose le lendemain avec sans grande péripétie.
Frailes : Pourquoi descendre lorsqu’on peut monter?
15 novembre 2004
Bon enfin, je me suis reposée. Ce repos m’a vraiment rafraîchi
et je suis prête à manger des montagnes. Ça tombe
bien parce qu’on va en manger! Bon, pour ne pas me prolonger dans
les descriptions, je vais dire rapidement que la journée n’a
été que de la montée. Après notre départ,
nous roulons à côté des plantations de café
et une petite pluie commence à tomber. Certains bouts de la route
sont manquants et nous glissons sur la boue. Puis, la pluie rend l’asphalte
très glissante, comme si la route aurait été couvertes
d’algues gluantes. Nous réussissons à passer cette
section sans tomber sur le derrière. Le froid commence. C’est
difficile jusqu’à Frailes.
En
entrant dans le village, les gens nous regardent la petite face dans
notre imperméable, avec un air de dire « ils sont fou ou
pauvre petits! ». Le village est assez beau et nous arrêtons
pour prendre un café chaud. Les montagnes sont de toutes beautés
et cette région fait définitivement partie de la zone
cafétalière du pays. L’on y voit pleins de coops
de café. Nous allons aussi acheter à manger à l’épicerie.
Même dans ce petit village nous retrouvons au moins 30 producteurs
de café différents. Ce qui est vraiment
un plus pour le Costa Rica c’est les productions biologiques du
pays sous l’étiquette Bioland. Sans avoir fait de recherche
sur Bioland, leur produit semble s’élever à des
standards assez hauts dans la culture biologique, sans tomber dans les
monocultures californiennes. Il vend pas trop cher et propose des produits
intégrales et bons pour la santé. Quel propagandiste suis-je!
Puis, nous avons continuer la route et le soleil est apparu. En passant
à côté d’une maison très fleurie, une
dame âgée nous a demandé si nous ne voulions pas
quelque chose à boire. Nous acceptons et la dame nous apporte
de la chicha de arroz. Elle nous invite à nous asseoir dans sa
maison. Nous jasons un peu et sans que je me rappelle comment nous sommes
arrivés sur le sujet, elle nous a invité à visiter
une pièce remplie de poterie. Pas de simple poterie. Son mari
était un passionné de l’archéologie. Les
pièces qu’elle nous montre une à une en nous expliquant
les formes d’animaux et la peinture, proviennent de l’époque
pré-colombienne. Elle nous explique où elles ont été
trouvées et comment procédait son mari qui avait des contacts
dans les universités (où il faisait dater ses pièces).
Il y a des jarres, des calices, des pots pour faire des offrandes. Les
poteries sont magnifiques et même si je ne connais rien à
l’arquéologie, il me semble que ces pièces doivent
valoir beaucoup… et que leur place serait dans un musée.
La dame a dit qu’auparavant (quelques années seulement)
les pièces de poteries ou en matériaux précieux
allaient dans les musées, mais les musées des États-Unis,
d’Europe…pas dans les musées nationaux. C’est
pourquoi son mari n’a pas voulu cédé ses pièces
à un musée.
Nous
remercions la dame et nous continuons notre route. Puis, nous rejoignions
finalement la Interamericana (ou pan-américaine). Je ferais bien
comme le pape et baiser cette bonne route qui nous a manqué.
Enfin une montée bicyclement acceptable! Ici, j’aimerais
souligner la présence d’une relation amour-haine. Lorsque
l’on sort de l’interaméricana, les paysages sont
magnifiques, les villages charmants et nous avons l’impression
de visiter le sous-pays, ce que les touristes ne voient pas. Ça
c’est l’amour. La haine vient des angles de route insolites
et des nids de poule gros comme un terrain de football et autres surprises
inattendues.
Faque la pluie a commencé. La vieille madame nous avait dit qu’un
front froid et qu’une tempête de pluie allait nous attendre
dans la direction du Cerro de la Muerte. À part ce que nous venons
de monter, il nous reste 60 km jusqu’au sommet qui est à
3491 mètres d’altitude. Heureusement, nous sommes entourés
par de la magnifique forêt et je me plaît à regarder
les plantes. Nous sommes complètement mouillés et nous
voyons en bas de la route, une église. Nous descendons en vitesse.
Nous allons toquer à la porte pour demander la permission mais
personne ne répond. On monte la tente rapidement sur un genre
de gazon éponge qui laisse sortir l’eau lorsqu’on
le presse. On se trouve une île ferme sur une mer de gazon-éponge.
On essaie de se réchauffer. Le vent et la tempête se poursuivront
toute la nuit et l’eau envahira lentement notre tente.
Cerro de la Muerte (ou la Montagne de la mort)
16 novembre 2004
On se réveille et la tempête continue. On range notre matériel
trempé et nous prenons la route dans le froid. On avance lentement
dans des nuages de pluie qui bougent plus vite que nous. Ça me
rappelle un peu trop les États-Unis (pluie et frette). Puis,
l’on passe un endroit qui a vraiment l’air cool, des cabañas
près de la forêt avec un café où ils servent
du café bio et équitable et font leur propre pain intégral
et fromage. Je m’imagine à lire près d’un
feu, propre et sèche. De toute façon, je n’ai pas
envie de rouler dans cette
température de merde alors que la tempête passera et que
nous aurons ainsi la chance de faire la montée plus facilement.
Je dis à Francis que j’aimerais bien m’arrêter
ici et je lui demande ce qu’il en pense. Il me dit qu’il
voudrait bien continuer encore un peu et qu’il aime ça
relever des défis physiques comme ceux d’aujourd’hui.
Sa réponse pique mon orgueil (oui, je suis orgueilleuse pour
ceux qui ne le savent pas!).
Même si je n’ai vraiment pas envie, je ne le dis pas par
orgueil et je continue à rouler. Je n’ai pas été
de très bonne humeur et je n’ai pas savouré ma journée
de vélo. Déjà quelques kilomètres après
avoir passé l’endroit merveilleux, Francis aurait bien
voulu s’arrêter aussi. Nous arrêtons pour manger et
nous grelottons malgré les chandails et la soupe chaude. Nous
avons froid à l’intérieur et nos dents claquent.
On continue la route et nous nous réchauffons un peu. Nous passerons
le reste de la journée à tenter de trouver un endroit
où dormir. Il n’y a rien sur la route. Puis, on voit une
annonce pour des cabañas mais à 4 km par des chemins de
terre. Nous avançons par ce chemin jusqu’à une énorme
descente qui sera impossible à remonter. Nous allons à
pied. Puis, nous voyons où sont petites maisons de luxe dont
le prix et la route ne seront pas accessible pour nous. Nous demandons
quand même où est le prochain endroit économique
pour se loger. Ils répondent 3 km. Nous revenons à la
route et nous sommes très fatigués. Nous faisons plus
de 10 km sans voir aucune indication ou édifice. Puis, nous arrivons
à Ojo de agua qui n’est pas une ville mais seulement un
magasin avec restaurant. Nous demandons où nous pourrions trouver
un hôtel? Dans 10 km. Où pourrions-nous camper où
il y a un toit? À 2km, dit l’homme du magasin qui vient
de nous vendre une brique de fromage fait localement. Il s’agit
d’une relique historique, une cabane construit par les pionniers
qui ont colonisé la Valle del General. Là-bas, dit-il,
vous pourrez camper à l’abri de la pluie et du vent.
Puis,
nous partons dans une petite descente qui est bien suffisante pour nous
geler jusqu’aux os. Il pleut toujours et un camion-remorque s’arrête
pour nous demander si nous voulons un lift. Je lui dit non car nous
avons déjà un endroit où camper et je ne veux pas
lâcher après avoir fait toute cette montée. Cependant
Francis n’est pas dans le même état que moi. Il tremble
comme il n’a jamais tremblé dit-il et aimerait que nous
embarquions dans le camion car il ne pourra pas camper cette nuit. Nous
montons dans le camion et je suis triste de quitter cet endroit que
j’aurais tant voulu voir dans le soleil. Nous demandons à
Bernardo le conducteur de nous débarquer au prochain hôtel.
Il est nica et travaille au Panama. Les nicaraguayens sont vraiment
détestés au Costa Rica. Comme le Nica est très
pauvre, les gens viennent travailler au Costa Rica et se font payer
des salaires très bas selon les standards Costa Rica. Ils viennent
donc « voler des emplois » disent les Ticos. Le camionneur
nous raconte avoir embarquer quelqu’un du Costa Rica qui n’a
pas arrêté de parler en mal des nicaraguayens. «
Lorsque je lui ai dit que j’étais nica, sa face a changé
au rouge comme un feu de circulation » dit-il. Quelle belle métaphore
de trucker! Au fil de la conversation, Bernardo a « oublié
» de nous laisser au prochain logis. Je dit oublier car Francis
et moi sommes assez sûr qu’il ne nous a pas descendu parce
qu’il voulait un peu de compagnie. Nous avons jasé beaucoup.
C’est un homme merveilleux et très gentil. Il nous a invité
à prendre un café et nous avons discuté presque
tout le trajet. Puis, il nous propose de nous amener à la frontière
du Panama même si nous lui avions déjà expliquer
le but de notre voyage. Il nous descend à San Isidro del General,
tout en bas des montagnes.
Nous sommes dans la chambre d’hôtel de passe et je suis
déprimée. J’ai envie de pleurer et je me demande
pourquoi
nous sommes encore dans une maudite ville alors que nous étions
au paradis de la nature. Francis aussi. J’ai l’impression
que je sentirai vraiment quelque chose d’incomplet si nous retournons
pas là-bas. Nous sommes donc d’accord, nous ferons sécher
l’équipement pour ne pas mourir encore de froid et nous
retournerons sur le pouce où nous étions. Nous prenons
donc une journée pour nous préparer et le jour suivant,
nous sommes sur la route à attendre un bon samaritain.
Nous
attendons longtemps, puis finalement type nous embarque dans son petit
camion. Il est tout rond et rit beaucoup. Il est trop attachant. Il
est missionnaire et porte une croix de bois dans le cou. Nous avons
jasé tout le long de sujet assez touchant. Lorsqu’il nous
a laissé à Ojo de agua, nous nous sommes fait une accolade.
Nous passons acheter d’autre fromage et nous roulons dans l’air
pur et frais jusqu’à notre nouvelle maison, la cabane des
pionniers. Les pionniers utilisaient la maison pour s’y abriter
durant la traverser jusqu’à la Vallée du général.
Lors de leur traversée, plusieurs passaient proche de la mort
à cause du froid, de la faim et des mauvaises conditions climatiques.
Heureusement pour nous, la grosse tempête est passée et
il fait maintenant une bonne fraîcheur canadienne.